♦. à chacun son histoire ...

La guerre n'est pas une aventure. La guerre est une maladie, c'est comme le typhus. Cela vous ronge de l'intérieur sans que vous ne puissiez comprendre comment cela vous arrive. Un jour, on vous dit que vous devez mener votre bataillon au front, vous n'avez pas le droit de refuser. Pour la patrie et pour l'honneur. Puis vous arriver sur place et l'enfer fait place au réel. Je me suis engagé dans l'armée par conviction, mais aussi parce que cela ce fait de père en fils depuis des générations dans ma famille. Je pensais être celui qu'il faut pour mener un bataillon à la victoire. Je pensais rentrer avec tous mes hommes en vie. Dès le premier jour en Afghanistan j'ai su que je m'étais trop voiler la face. Là-bas la vie est un autre rêve. Les gens ce battent pour quelques minutes de plus. Le diable est présent a chaque coin de rue. C'est bien la première fois que j'ai craint pour ma vie. Malgré tout, ma formation de militaire a pris le dessus. Nous nous sommes battus pour notre pays. Pour la paix dans le monde, pour tout cela. On y a cru, chaque journée, chaque mois, chaque année. Bien entendu on a vécu les horreurs de la guerre. Les copains qui tombent sous la pluie des balles, le chef de commando qui se fait enlever par des terroristes. On a dû se cacher. Mentir sur notre nationalité. Je me suis fait passer pour un français, mais également pour un espagnol. Je me suis fait passer pour un casque bleu pour ne pas me faire descendre sur le champ. On a rusé. On a survécu. Sept ans. Sept ans de dur labeur et d'enfer. Sept ans sans revoir ma famille ou mes amis. Mais on a eu des victoires bien sûr. Le recul des forces armées, la baisse de la violence et d'autres plus minimes encore. On avait réussi vraiment. Je m'en souviens comme si c'était hier, c'était le 23 juillet 2010, Noam et moi étions encore entiers. Noam, mon meilleur ami, celui que j'ai connu au Lycée et avec qui je me suis engagé. On n'a jamais été séparés et nous n'avions jamais été aussi heureux que ce jour-là depuis notre arrivée en Afghanistan. On venait de recevoir une lettre du Président qui nous annonçait le retrait de notre bataillon pour le lendemain matin. On avait presque envie de sauter au plafond et puis tout a basculé sans qu'on ne comprenne d'où venait le problème. Il y a eu un assaut ennemi sur notre base bien entendu aucun de nous n'était équipé. On s'est fait avoir dans notre propre bâtiment. L'espace d'un instant, j'ai perdu de vue Noam et puis il y a eu une explosion qui a tout soufflé sous son passage. Je me souviens que tout ce passais au ralenti dans ma tête après cela. J'avais un tympan explosé et c'est là que j'ai aperçu mon meilleur ami. Il gisait au sol, inconscient, un trou béant à la place du coeur. Je n'ai pas compris le reste. J’ai pris une balle dans l’épaule, mais je m’en fichais tout ce qui comptais c’était de rejoindre Noam. J’ai tenter de mettre ma main sur sa blessure pour empêcher l’hémorragie. Je n’ai aucune formation d’infirmier, mais pour sauver la vie de mon meilleur ami je ferais n’importe quoi. L’assaut n’aura durer que quelques minutes seulement, mais les dégâts furent nombreux. Les souvenirs sont encrer dans ma tête à tout jamais, mes meilleurs hommes mort tout autour de moi et la vie de Noam qui filait entre mes doigts. Je me souviens très bien de ses derniers mots : « Barre toi de la Ryan, vis ta vie, pour moi… ». Cette image me hante chaque jours. Comme une blessure qui ne pourra jamais ce refermer. Un cauchemar qui me poursuis nuit et jour. Je ne souhaite a personne de voir ce que j’ai pu voir là-bas, de vivre ce que j’ai pu vivre ce jour-là. De ce voir impuissant face a un ami qui ce meurt dans vos bras, de sentir les balles traversent votre corps. J’ai vu la mort de près et je m’en voudrais toute ma vie d’avoir survécu a mes compagnons.

Le retour au pays a été plutôt violent. Je ne suis jamais retourné à Seattle. Impossible d'aller annoncer à la famille de Noam que celui-ci est décédé au combat pour nous protéger. Non vraiment je suis incapable de faire cela. C'est comme cela que j'ai atterris ici à San Mena. Dire que je ne connaissais même pas l'existence de cette ville avant d'arriver ici. Pourquoi cet endroit au lieu d'un autre. Bof pourquoi pas. J'avoue avoir attrapé une carte du pays et poser mon doigt au hasard sur l'immensité de notre très chère patrie. San Madena. Ville de looser. Mais au moins, c'est endroit ou personne ne me connaît, ou personne n'aura à me poser de question sur mon passé de soldat. Pour tout le monde ici je suis le nouveau barmen au regard profond et aux nombreuses cicatrices. Je ne suis rien d'autres. Je sers des verres à des pauvres mecs qui se lamentent sur leur vie et cela me suffit amplement en réalité. Je dors de moins en moins. Les cauchemars sont incessant, je revois toujours le visage de Noam et je suis incapable de m'endormir après cela. Je voyais réellement tout en noir, vraiment, jusqu'à ce que je rencontre cette fille dans mon bar. Une magnifique brune répondant au joli prénom de Tammie. Une fille qui est venue chamboulé mon petit monde et la noirceur de mon âme. Elle a remis un peu de soleil dans ma vie alors que je ne la connais même pas. Je l'ai juste aidé l'autre jour alors qu'elle se faisait emmerder par un vieux con dans le bar. Mon côté héros est ressorti ce soir-là. Elle était plutôt bien amochée il faut l'avouer. Dans un élan de bonté, je l'ai ramené chez elle. Elle m'as embrassé depuis je ne l'ai plus revu. Je ne sais pas du tout si je serais capable de me mettre dans une véritable relation. Elle semble méritée quelqu'un de bien ou tout du moins mieux que moi, mais j'ai une envie, une véritable envie de la connaître. Cette si jolie fille.